jeudi 7 avril 2011

ELO#48 - Siné: le DVD


Jeudi 7 avril 2011

Mourir ? Plutôt crever ! le film de Stéphane Mercurio, avec Siné (2010, 95 min, couleurs)

En DVD pour 18 Euros là:
http://www.editionsmontparnasse.fr/p1354/Mourir-Plutot-crever-DVD

À 80 ans, Siné, continue le combat. Il n’a jamais faibli, ses rages sont celles de ses 20 ans. Viré de Charlie Hebdo, il rebondit en créant Siné Hebdo. C’est au fil de cette aventure qu’il raconte ses combats passés. Athée, anti-flics, anti- armées, anticolonialiste, ami des chats, fou de jazz et de salsa. Le dessinateur a pris fait et cause pour les Algériens pendant la guerre d’Algérie, a fait de Malcolm X le parrain de sa fille, s’est lié d’amitié avec Prévert… Il s’est toujours engagé, s’est parfois trompé, le reconnaît volontiers. Sa férocité, il la tient de son immense tendresse pour tous les opprimés. Alors, il rage contre les nantis de tous poils. L’homme du « journal mal élevé » a de sacrés principes.

Avec le DVD, en bonus:
- Le Monde de Siné : Dessin animé
- Ah Ah Ah Ah Ah… : Dessin animé interdit au moins de 18 ans
- Ciao, Siné Hebdo
- Projection à Siné Hebdo

Et le CD des musiques du film:
- FATAL MAMBO - L’Apéro
- DEXTER GORDON - La Chaloupée
- ERROLL GARNER - Frankie and Johnny
- COUNT BASIE ET STAN GETZ - Blues
- VICK DICKENSON and the HOT JAZZ STARS - Battle of Blues
- BESSIE SMITH - On Revival Day
- MILES DAVIS - Dear Old Stockholm
- LA FANFARE GRAN WAZO - Siné qua non
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Laurent Coq, pianiste de jazz, prend la parole pour dire tout haut ce que, parait-il, la majorité des musiciens de jazz pense tout bas, de peur de ne plus jamais pouvoir jouer nulle part...

Cette lettre s'adresse à Sébastien Vidal, programmateur de la radio TSF Jazz, du Duc des Lombards et du festival Django Reinhardt, mais un débat plus large est voué à en résulter ici:
http://revolution-de-jazzmin.blogspot.com/
http://revolution-de-jazzmin.blogspot.com/2011/04/lettre-ouverte-sebastien-vidal.html#comments

Je ne sais pas à quel point les problèmes soulevés pourraient également concerner d'autres musiques...

Dror
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Sébastien,

Il est venu le temps pour moi de t'alerter sur ce que je pense être une dérive inquiétante.

Je passe sur le fait que tu ne répondes pas aux emails, messages, et propositions qui, en ce qui me concerne, m'ont demandé du temps et de l'investissement... je conçois que lorsque l'on organise des "concerts de filles" à l'Olympia, on n'ait plus trop le temps de s'occuper de musiciens français quarantenaires qui ne sont pas sexy aux yeux des investisseurs de TSF. Dommage pourtant, car ma proposition (de faire une émission hebdomadaire sur TSF d'une heure pour passer la production New-Yorkaise contemporaine) aurait permis à votre boite de clamer passer "tous les jazz" sans mentir.

Non, mon inquiétude concerne le Duc des Lombards. Pour y avoir joué quelques fois ces derniers temps, et surtout pour y avoir été écouter de la musique, je suis obligé de tirer la sonnette d'alarme. Après tout, ce club, c'est aussi un peu le mien. J'y ai enregistré un disque il y a dix ans, et j'y joue depuis au moins le double.

Pourtant, je pensais qu'après la période désastreuse de Proust, l'endroit allait redevenir un allié de cette musique. Peut-être est-ce du à l'endroit lui même ? Cette espèce de décors minable pour clip de rap des années 90 ? Quoiqu'il en soit, c'est raté. Et votre programmation n'y fait rien. Ne m'a-t-on pas rapporté que Brian Blade s'est mis à pleurer discrètement sur scène après avoir demandé aux gens du premier rang de manger plus discrètement, en vain ?

Le Duc, le club qui a réussi à faire pleurer Brian Blade.

Finalement, la différence avec Eurodisney, c'est que c'est au centre de Paris. Sinon, c'est le même public de comité d'entreprise qui vient en bus pour écouter un Bon jazz, avec la même bouffe infecte qu'on n'oserait pas servir au wagon restaurant du TGV. Le décor est tellement énorme que le seul endroit qui reste aux musiciens c'est ce couloir d'entrée dont le plancher flottant rappelle les sensations qu'on a sur un bateau, avec un son qui nous parvient déformé, et sans accès au bar. Ces écrans partout ne font que renforcer l'impression d'être sur un plateau de télé, avec le groupe qui joue en léger différé...

J'ai bien conscience qu'en envoyant ce mail à toi, et à quelques autres, je me grille. Du reste n'est-ce pas déjà fait, puisque j'entends dire que tu n'acceptes pas que les musiciens qui jouent "chez toi" jouent aussi ailleurs dans la rue des Lombards. As-tu définitivement pété les plombs ? Sais-tu la dureté de ce métier pour te permettre de penser et dire des choses pareilles ? Crois-tu qu'un gig tous les trois mois (au mieux) au Duc te permette d'exiger une telle exclusivité ? Même à NY, personne ne pense comme ça.

Plus largement, je pense que cette manière de voir les choses - et le Duc tel qu'il est devenu - trahissent une dérive très inquiétante. Bien sur, dans ce petit monde à l'économie si fragile, ce sont des choses qu'on n'ose pas (te) dire. Les enjeux sont trop gros, et la perspective d'être rayé des listes pousse au silence docile. Te connaissant maintenant depuis assez longtemps, et par ailleurs, ayant de la sympathie pour toi, prends ce message comme une marque d'honnêteté.

Il est grand temps de prendre conscience que le jazz est entré en mode Sarkozy. Une manière Bling-bling de le présenter et de le vendre, qui voudrait adopter les même méthodes que pour la variété qu'on sert sur M6. Et bien, non. Le Jazz ne peut supporter pareil traitement sans en pâtir gravement. C'est malheureusement déjà le cas, et je constate avec beaucoup de tristesse que tout un pan - le plus créatif - de cette musique n'a plus droit de cité ni sur la scène du Duc, ni sur les ondes de TSF, ou alors à dose homéopathique.

Je comprends qu'il faut trouver un bon dosage entre ce qui fait vendre et par conséquent rapporte, et ce qui continue de faire avancer cette musique. Pour ma part, je pense que ce dosage n'est pas satisfaisant en l'état actuel.

J'espère que ce mail lancera un débat qu'il est plus que temps d'avoir à mon sens. C'est notre musique qui est en jeu et j'en appelle à un sursaut de la part des musiciens comme des programmateurs.

Amicalement,

Laurent Coq
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Un article intéressant sur un sujet déjà abordé ici: la baisse de la vente de disques n'est 1) pas de ma faute et 2) pas de la faute d'internet:

Pourquoi les ventes de disques baissent-elles ?
Par Laurent Chemla
Manière de voir nº 109, février - mars 2010.
http://www.monde-diplomatique.fr/mav/109/CHEMLA/19340

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