mercredi 26 septembre 2012

ELO#120 - Bettye Lavette


Mercredi 26 septembre 2012

Bettye Lavette, dont Siné est un grand fan, fête ses 50 ans de carrière, de la soul confidentielle, au blues et enfin au succès récent (2005). C'est donc un nouvel album qui sort, une tournée qui passe par la France, mais aussi une autobiographie où elle raconte sa vie... et ce n'est pas triste, au point qu'elle a demandé à sa petite fille de ne pas lire son autobiographie avant l'âge de 50 ans, et à son petit fils de ne jamais la lire!

Elle enregistre son premier disque à 16 ans, et c'est un succès, My Man, He's a Loving Man, malheureusement, suivi d'aucun autre, malgré d'innombrables tentatives dans des maisons de disques de plus en plus petites, de tournées de concerts, de changements de styles etc. Elle garde quand même quelques fans, dont Siné qui l'a connue en concert à New-York à cette époque là!

Ses malheurs la rendent plus crédible quand elle chante le blues et son morceau le plus connu (relativement) est sa version poignante de Let Me Down Easy (Largue moi en douceur...), ici en 1999.

Comme beaucoup d'autres, elle tombe enceinte, se marie et se prostitue très jeune, consomme des litres de cocaïne, de marijuana et d'alcool... Mais au contraire de beaucoup d'autres, elle ne fréquente jamais d'église et porte même un T-shirt sur lequel est écrit "Everybody has to believe in something. I believe I'll roll another joint" (Chacun doit croire en quelque chose. Je crois que je vais me rouler un autre joint). Une athée dans la soul aux USA? C'est assez rare pour être signalé...

Au passage, elle avoue avoir couché avec nombre d'hommes mariés: Otis Redding (soi disant fidèle...), Ben E. King, Ted White (alors mari d'Aretha Franklin), regrette de n'avoir jamais réussi à se taper Marvin Gaye, et raconte qu'on lui a même proposé de dépuceler Stevie Wonder... Elle défend Ike Turner contre un grand nombre d'allégations de Tina, et raconte la haine qu'elle et la plupart de ses collègues vouaient à Diana Ross!

Aujourd'hui, elle obtient enfin le succès en versant dans une musique pas très originale, mais avec une belle voix et de bons musiciens, en se spécialisant dans les reprises très personnelles d'un répertoire pop. Par exemple, cette magnifique version de la chanson de George Harrison, Isn't It A Pity?

Sacré bonne femme, qu'on pourra voir:
le 5 décembre à Paris, à l'Alhambra
le 7 décembre à Bordeaux, au Casino Théâtre Barrière
le 8 décembre à Conflans Sainte Honorine, au Théâtre Simone Signoret
le 9 décembre à Lille, à l’Hôtel Casino Barrière

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Mashrou' Leila, The Professor, Gorillaz Sound System et Qassem Al-Najar

Rendons hommage aux artistes qui ne vont PAS en Israël se faire de l'argent sur la souffrance des Palestiniens, qui comprennent la situation sur place et le pouvoir qu'ils ont entre leurs mains lorsqu'ils décident de s'y rendre ou de ne pas s'y rendre.

En particulier, rappelons le courage du groupe de rock libanais Mashrou' Leila qui a annulé sa participation au concert des Red Hot Chili Peppers à Beyrouth au début de ce mois, pour protester contre leur concert à Tel Aviv. Donnons tort à tous leurs détracteurs et réservons leur notre meilleur accueil le 3 octobre à la Cigale, à Paris.

Parmi les artistes qui s'intéressent au sort des Palestiniens, on trouve également The Professor, Harrisson Stafford, chanteur du groupe de reggae Groundation avec lequel il avait déjà composé le titre Hebron. Il revient maintenant d'un voyage en Cisjordanie et il publie un premier album solo, Madness, qui parle énormément de l'occupation israélienne, comme en témoigne le titre Intifada. Il sera:
le 2 octobre à Paris au Divan du Monde
le 4 octobre à Mâcon à la Cave à Musique
le 5 octobre à Pagney chez Paulette
le 6 octobre à Bagneux au Théâtre Victor Hugo
le 7 octobre à Bruxelles à l'Ancienne Belgique
le 9 octobre à Rillieux La Pape à la MJC O Totem
le 10 octobre à Ramonville au Bikini
le 11 octobre à Bordeaux à la Rock School Barbey
le 12 octobre à Alençon, à La Luciole


Enfin, le 23 novembre au Centquatre à Paris, le groupe Gorillaz Sound System viendra participer à un festival de musique électronique, le Télérama Dub Festival. Il avait annulé sa participation à un tel festival à Tel Aviv en juin 2010 pour protester contre l'attaque meurtrière de l'armée israélienne contre la Flottille de la Liberté pour Gaza.

A propos de Palestine, vous savez que le Printemps Arabe commence à s'y développer, c'est à dire des protestations des Palestiniens contre leurs gouvernants (l'Autorité Palestinienne), principalement sur des revendications sociales. Une chanson a même été écrite à l'occasion, Dabber Halak Ya Fayyad (Débrouille-toi Fayyad) par Qassem Al-Najar...
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Archie Shepp

Chaque année on retrouve Archie Shepp au Festival de Jazz de La Villette et je commençais à me lasser de voir ce saxophoniste, pourtant bien engagé politiquement, excellent dans tous les styles de jazz, des chants de coton au rap en passant par le be bop et le free jazz. Mais cette fois ci, la reprise de son chef d'oeuvre de 1972, l'album Attica Blues (en réponse aux 39 morts lors de l'émeute de la prison d'Attica après le meurtre du Black Panther George Jackson à San Quentin), me faisait craindre du "réchauffé"...

Et puis la disponibilité de son concert sur internet m'a poussé à le regarder encore une fois, et encore une claque. C'est génial, même a 75 ans, et avec Amina Claudine Myers, 70 ans, au piano. Toujours aussi politisé et plus funky que jamais, pendant plus de deux heures!

Interview sur Fip le 9 septembre 2012

Jazz à la Villette: Archie Shepp's Attica Blues Big Band le 9 septembre 2012

Setlist:
01) Quiet Dawn (Cal Massey, au chant: Marion Rampal)
02) Come Sunday (Duke Ellington, au chant: Cécile McLorin Salvant)
03) Blues For Brother George Jackson (Archie Shepp)
04) Steam (Archie Shepp, au chant: Cécile McLorin Salvant, à la trompette: Ambrose Akinmusire)
05) Arms (Amina Claudine Myers)
06) The Stars In Your Eyes (Archie Shepp, au chant: Marion Rampal)
07) The Cry of My People (Cal Massey, à la trompette: Ambrose Akinmusire)
08) Mama Too Tight (Archie Shepp)
09) Ballad for a Child (Archie Shepp, au chant: Amina Claudine Myers)
10) Goodbye Sweet Pops (Cal Massey)
11) U-Jaama (Archie Shepp)
12) Déjà Vu (Archie Shepp, au chant: Cécile McLorin Salvant)
13) Attica Blues (Archie Shepp)
14) Encore: Mama Too Tight (Archie Shepp)

Le texte de Jean Genet, dont Archie Shepp parle lors du concert:

Il est de plus en plus rare en Europe qu’un homme accepte d’être tué pour les idées qu’il défend. Les Noirs en Amérique le font chaque jour. Pour eux, « la liberté ou la mort » n’est pas un slogan de mirliton. En entrant dans le Black Panther Party, les noirs savent qu’ils seront tués ou qu’ils mourront en prison. Je vais parler d’un homme célèbre maintenant, George Jackson, mais si le tremblement provoqué en nous par sa mort n’a pas cessé, nous devons savoir que tous les jours de jeunes noirs anonymes sont abattus par la police ou par des blancs dans la rue, d’autres sont torturés dans les prisons américaines. Morts, ils survivront parmi nous – ce qui est peu – mais ils vivront parmi les peuples écrasés par le monde blanc, grâce à la voix retentissante de George Jackson.

Au contraire des Américains, partis victorieux au Vietnam faire la guerre par manque d’idées, qui en reviennent cassés, les noirs entrent dans la prison ou la mort, pour en resurgir vainqueurs. Des multiples tueries de noirs, de la prison de Soledad au massacre d’Attica, assassiné par des tueurs d’élite – d’élite ! -, George Jackson se relève, s’ébroue, maintenant illustre, c'est-à-dire lumineux et porteur d’une lumière si vive qu’elle le désigne et désigne tous les Américains noirs.

Qui était George Jackson ? Un noir de dix-huit ans emprisonné pendant onze ans pour complicité de vol de soixante-dix dollars. Ecrivain magnifique, un des plus grands écrivains noirs, auteur de lettres éparses qui rassemblées, donnent un livre révolutionnaire. Frère de Jonathan Jackson, qui à dix-sept ans, entra dans le prétoire de San Rafael, libéra trois noirs en se saisissant d’un otage ; le juge. Enfin, le martyr décidé, c’est-à-dire conscient, assassiné le 21 août dans la cour – ou dans la cellule – de la prison de San Quentin la veille de son jugement.
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Charlie Hebdo, suite

Alain Gresh vient de publier sa chronique sur l'affaire Charlie Hebdo. A croire qu'il a tout pompé sur ma chronique de la semaine dernière: il compare la liberté de caricaturer et la liberté de manifester, à géométrie variable, minimise l'effet si terrible de cette manifestation "non autorisée", la compare avec les manifestations contre la guerre au Viet Nam ou avec celles du FN, déplore l'abus du terme islamiste qui ne veut plus rien dire... Il franchit le point Godwin en fin d'article, ce qui n'était pas indispensable, mais c'est comme toujours une excellente chronique...

Il est difficile, je suis bien placé pour le savoir, de faire vivre un journal satirique hebdomadaire en France. On ne trouve pas facilement 40.000 personnes prêtes à débourser 2 Euros chaque semaine pour acheter un journal qui va les faire rire sur une base politique de gauche. C'est pour ça que Siné Hebdo a fermé, et c'est pour ça que Charlie Hebdo galère.

J'ai vu les fameuses caricatures de la semaine dernière dans Charlie Hebdo, et ce qui me frappe avec la quasi totalité d'entre elles (entre autres celles qui ont fait scandale), est qu'elles ne sont PAS directement anti musulmans, ni même des représentation "du prophète", puisqu'elles décrivent et se moquent de scènes du film islamophobe. On y voit donc dessiné l'acteur qui joue Mahomet, pas Mahomet lui même. L'objet de la moquerie, voire de la critique, est donc surtout le film, et à la rigueur on pourrait presque dire que les caricatures de Charlie Hebdo sont pro-musulmanes!

C'est là que ça devient intéressant, parce que Charlie Hebdo pourrait se défendre en disant ça, en disant "nous, on ne se moque pas des musulmans, mais du film". Mais s'ils faisaient ça, ils ne gagneraient pas autant de thunes en vendant 75.000 exemplaires en quelques heures, à 75.000 beaufs islamophobes qui n'achètent pas Charlie Hebdo en temps normal!

Pire que les dessins de Charlie Hebdo est donc la fange dans laquelle ils se vautrent pour survivre, en séduisant un lectorat abondant, donc beauf, raciste, de droite, voire d’extrême droite, mais qui les sauve de la faillite. Un lectorat probablement très éloigné non seulement de leur lectorat naturel, mais peut-être même de leurs propres idées, s'il leur en reste un peu...

Mais même chez ceux qui soutiennent l'islamophobie opportuniste de Charlie Hebdo, certains ont été choqués, samedi dernier place du Trocadéro, par le comportement des flics de Valls:
-Au Trocadéro, des arrestations au faciès au prétexte de la lutte contre l'islamisme - Valls, Guéant, même combat
-Vidéo du Parisien
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Archives

Textes disponibles dans l'excellent Manières de Voir sur l'Histoire des Gauches au Pouvoir, un peu ardu mais très instructif sur le nauffrage de la Gauche européenne dans ce que le Diplo appelle le Triangle des Bermudes des idées économiques néo-libérales, et dont François Hollande n'a pas l'air de vouloir sortir...

L'utopie réalisée de la Commune
Par Christophe Voilliot, Monde Diplomatique, décembre 2011

Léon Blum, décembre 1927, congrès extraordinaire de la Section française de l'Internationale ouvrière (SFIO): « Il est vrai que, pour toutes sortes de raisons, des formes nouvelles du capitalisme sont apparues, et des formes qui prennent (...) un caractère de plus en plus dictatorial ; il est vrai que l'extrême concentration des entreprises industrielles, que l'introduction, corrélative à cette concentration, de nouvelles méthodes industrielles, que la création et le développement, par-dessus la concentration industrielle, de (...) la super-concentration bancaire, il est vrai que tout cela a donné au capitalisme nouveau une forme nouvelle, et que ce capitalisme impose maintenant sa dictature même aux Etats, mêmes aux institutions politique, et que nous le voyons commettre chaque jour de nouvelles usurpations de souveraineté. »

Discours devant l'Assemblée générale des Nations unies, le 4 octobre 1984
Par Thomas Sankara

Comme le dit Ernesto "Che" Guevara: "le capitalisme est le génocide le plus respecté au monde"


Au lieu de s'exciter sur de pseudo atteintes à la liberté d'expression de Charlie Hebdo, à tous ceux qui nous ont enjoint de voter Hollande, et de voter plutôt que de s'abstenir, à tous ceux qui nous ont promis que la lutte ne s’arrêterait pas là, qu'on exigerait de Hollande qu'il applique le changement tant attendu, à tous ceux qui s'impatientent que des mesures soient prises, quelles excuses et quelles diversions allez-vous trouver pour ne pas venir dimanche prochain à la manifestation nationale qui va exiger que Hollande respecte sa promesse de campagne et se lance dans une autre façon de gérer la crise financière en Europe en ne signant PAS le traité d'austérité européenne?

Dimanche 30 septembre, 13h30, Nation - Place d'Italie (Paris):
Manifestation nationale, non à l'austérité permanente,
refusons le Pacte budgétaire, ouvrons le débat en Europe !

http://www.demosphere.eu/node/31603
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Autres musiques


Le dernier album live de Maceo Parker (des reprises de standard de soul) en écoute

Spike Lee sur Michael Jackson et sur Prince

Et Juan Rozoff, le Prince français, en interview barrée (avec cette blague: Comment on fait pour devenir millionnaire en faisant du Jazz ? Ben, il faut être milliardaire avant...)

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